lundi 5 janvier 2009

BENOÎT XVI ET LA PALESTINE:DE QUI A-T-IL DONC PEUR?


L’invasion de Gaza par les forces sionistes d’Israël soulève la colère du monde civilisé et libre. Ceux et celles qui s’y complaisent ne peuvent appartenir à ce monde, même s’ils sont les premiers à s’en revêtir. Le VATICAN, par la voix de son porte parole officiel, a eu le courage d’une prise de position indépendante et libre des influences sionistes.


« L'acharnement d'Israël à Gaza a renforcé la répugnance ‎mondiale envers ce régime », a annoncé, samedi soir, le porte-‎parole du Vatican, Monseigneur Federico Lombardi, à ‎l'antenne de Radio Vatican. « Les crimes commis par les ‎sionistes ne font qu'augmenter la répugnance mondiale envers ‎les Israéliens et réduire l'espoir en la paix », a constaté le ‎porte-parole du Vatican, qui s'est dit surpris par l'ampleur des ‎raids, déplorant le bilan lourd de ces attaques sauvages. « Israël ‎poursuivra les opérations manu militari contre le peuple ‎palestinien », a-t-il prévu. ‎ (28/12/2008)

Comment ne pas apprécier cette prise de position qui ne laisse aucune ambigüité sur les principaux responsables de ce qui se passe actuellement en Palestine et tout particulièrement à Gaza?

Mais voilà que, Benoît XVI, en tant que chef de l’État du Vatican, s’est bien gardé de faire quelqu’allusion que ce soit à cette prise de position officielle. Évidemment que la couverture médiatique d’une déclaration faite par Radio Vatican n’a pas la même couverture médiatique que celle faite par le Pape sur la Place St-Pierre. Ses interventions, à ce jour, ménagent plutôt Israël et les sionistes.

«Je demande à la communauté internationale de faire son possible pour aider les Israéliens et les Palestiniens à sortir de cette voie sans issue et de ne pas se résigner, comme je le disais il y a deux jours dans le message urbi et orbi, à la logique perverse de la confrontation et de la violence, mais de privilégier le chemin du dialogue et des négociations ».

Comme on peut le constater, il s’est bien gardé de prendre à son compte la position officielle du Vatican, exprimée par Monseigneur Federico Lombardi. Pourtant, la Maison Blanche, dans ses déclarations, assume ses prises de position officielles et les répète à chacune de ses conférences de presse : Gaza est responsable de ce qui arrive et Israël est en droit d’assurer sa sécurité. Il en va de même pour le Gouvernement canadien qui ne manque pas une occasion pour transférer sur les palestiniens la responsabilité de ce qui se passe à Gaza. Quant à Benoît XVI, il n’arrive pas à assumer la position de l’État du Vatican : « Les crimes commis par les ‎sionistes ne font qu'augmenter la répugnance mondiale envers ‎les Israéliens et réduire l'espoir en la paix. » Il choisit plutôt une sorte de neutralité qui ne sert finalement personne. C’est comme si le courage qui caractérise le prophète n’y était pas.

Récemment, il y a eu un synode à Rome portant justement sur la Parole de Dieu. Une Parole que l’on retrouve dans les Écritures et de façon particulière chez les prophètes. Il leur en fallait du courage pour transmettre aux rois, aux puissants et aux grands prêtres de leur temps le message de Dieu. Benoît XVI, pourrait-il, par exemple, prendre à son compte ces paroles du prophète Isaïe et avoir le courage de les adresser aux sionistes d’aujourd’hui qui ne cessent de gruger le territoire palestinien et d’en réduire la population ?

"Malheur à ceux qui ajoutent maison à maison, et qui joignent champ à champ, jusqu'à ce qu'il n'y ait plus d'espace, et qu'ils habitent seuls au milieu du pays ! Malheur à ceux qui appellent le mal bien, et le bien mal, Qui changent les ténèbres en lumière, et la lumière en ténèbres, Qui changent l'amertume en douceur, et la douceur en amertume; Qui justifient le coupable pour un présent, Et enlèvent aux innocents leurs droits ! Malheur à ceux qui prononcent des ordonnances iniques, Et à ceux qui transcrivent des arrêts injustes, pour refuser justice aux pauvres, et ravir leur droit aux malheureux de mon peuple, pour faire des veuves leur proie, et des orphelins leur butin !" (Is.5-10)

Je sais que Benoît XVI est parfois capable d’appeler par leurs noms ceux qu’il condamne. Lorsqu’il s’agit des « terroristes », de ceux-là mêmes qui sont désignés comme tels par la Maison blanche, il les invite à déposer les armes et à se convertir en artisans de paix. À défaut de quoi, il sera légitime qu’ils soient combattus. C’est actuellement le cas pour les talibans en Afghanistan.

En tant que chrétien et membre de l’institution ecclésiale j’ai parfois honte des alliances qui privent Benoît XVI de cette liberté du prophète. C’est toute la catholicité, dans son sens universel, qui en souffre.

Oscar Fortin, théologien et politologue
Québec, le 5 janvier 2009
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samedi 3 janvier 2009

CUBA: 50 ANS DE LUTTE ET DE DÉVELOPPEMENT

Il y a 50 ans « Papa Doc Duvalier » régnait sur Haïti comme Batista sur Cuba. Deux îles voisines dont les peuples vivaient la dépendance, la pauvreté, l’analphabétisme, les maladies qui frappaient, souvent mortellement, ceux et celles qui en étaient atteints. Ils étaient tous les deux dans les bonnes grâces du puissant voisin du nord, les États-Unis. « Papa Doc » était leur homme tout comme Batista. Cette grande démocratie ne se faisait pas de scrupule avec ces dictateurs, pas plus d’ailleurs qu’avec la corruption et la répression qui caractérisaient leurs administrations. Les missionnaires apportaient les dons de Dieu et une aide humanitaire, donnant ainsi bonne conscience, alors que leurs peuples livraient, à la sueur de leur front et pour une bouchée de pain, les richesses de leurs terres. Les pays développés auxquels nous appartenons faisaient appels à la générosité pour l’aide humanitaire et se gardaient bien de dénoncer les prédateurs qui se nourrissaient de cette pauvreté.

Le premier janvier 1959, des jeunes, avec à leur tête un certain Fidel, révoltés devant autant d’injustice et de misère, soutenus par tout un peuple, renversent, après une lutte qui aura duré plus de 6 ans, le régime corrompu de Batista. Ça se passait à Cuba (11.4 millions h). Ces jeunes n’étaient pas à la recherche d’une fortune personnelle, d’un pouvoir de domination. Ils étaient dominés par la pensée que la justice est un droit fondamental pour tous et toutes, que le respect et l’indépendance ne sont pas réservés qu’aux privilégiés et aux puissants, que les biens de la terre doivent prioritairement servir les besoins les plus essentiels des personnes : l’alimentation, l’éducation, la santé, l’habitation, un travail décent. Plusieurs y auront laissé leur vie alors que d’autres l’auront quotidiennement risquée. Cet idéal était devenu celui de tout un peuple.

Les premiers mots de Fidel, à son arrivée à la Havane en ce 6 janvier 1959, ont été pour reconnaître le courage et le civisme du peuple cubain qui a rendu possible cette grande victoire.

« Notre bataillon le plus solide, notre meilleure troupe, l’unique troupe qui est capable de gagner seule la guerre, cette troupe c’est le peuple. Un général ne peut rien contre un peuple, une armée ne peut rien contre un peuple. Parce que le peuple est invincible et c’est le peuple qui gagna cette guerre.

Le peuple, le peuple gagna la guerre, cette guerre que personne d’autre que le peuple ne pouvait gagner. Je le dis et le redis au cas où quelqu’un penserait que c’est lui qui la gagna ou qu’une troupe penserait que c’est elle qui la gagna. C’est d’abord et avant tout le peuple qui est vainqueur de cette guerre.

Je suis orgueilleux de la discipline du peuple et de l’esprit du peuple, parce que s’il a fait quelque chose de vraiment excellent c’est de démontrer sa dignité et son civisme. Ça vaut la peine de se sacrifier pour un tel peuple. Jamais nous ne trahirons notre peuple. »

C’est ce même leader, 50 ans plus tard, qui, de son lieu de convalescence où l’a confiné la maladie, prend de nouveau la plume pour reconnaître une fois de plus le courage et la force d’un peuple qui a rendu possible le parcours des 50 années de révolution parsemées d’innombrables embuches. Celui qui a repris à son compte cette parole de Marti « que toute la gloire du monde peut être contenue dans un grain de sénevé » s’est fait discret pour laisser toute la place à ce peuple avec qui il a lié son destin.

Les ennemis d’un tel changement n’ont rien ménagé pour faire de cette révolution la démonstration d’un échec démobilisateur pour tous les autres peuples. Il y a eu ces centaines de tentatives d’assassinat de Fidel, l’invasion criminelle de la Baie des cochons, le blocus économique rendant son développement encore plus difficile, les mille et une difficultés mises en place pour rendre l’émigration des cubains et cubaines plus sécuritaires, les centaines de millions de dollars pour transformer en criminels ces héros d’une révolution qui ont fait basculer tout un peuple de la dépendance à l’indépendance, de l’analphabétisme à l’éducation pour tous et toutes, de l’individualisme à la solidarité. Cinq de ces héros sont toujours détenus injustement dans les prisons étasuniennes. En dépit de la désinformation dont les médias de l’empire a le secret, le monde sait les conquêtes réalisées par ce peuple dans les secteurs de la santé, ceux de l’éducation, ses contributions dans ces mêmes secteurs dans les nombreux pays de l’Amérique latine et des caraïbes. Son organisation sociale lui permet d’affronter, sans perte de vie, les ouragans qui sèment la mort et la destruction dans les pays voisins, y compris aux États-Unis. Il a développé un sens de la solidarité qui revêt les mêmes impératifs que les impôts que nous payons dans nos pays, à l’exception près que tous et toutes y participent avec ce sens de la responsabilité partagée et celui du Bien commun. Il n’y a pas d’exception.

Cet exemple du peuple cubain et de certains de ses leaders charismatiques comme Che Guevara, Fidel Castro ont inspiré de nombreux autres peuples et trouvé auprès de grands intellectuels et Prix Nobel de la paix encouragements et supports. Aujourd’hui, la Bolivie (9.3 millions h.) avec Évo Morales, le Venezuela (26.4 millions h.) avec Hugo Chavez, l’Équateur (13.5 millions) avec Rafael Correa, le Brésil (178 millions h.) avec Lula, le Nicaragua (5.7 millions h.) avec Daniel Ortega, tous élus démocratiquement avec de fortes majorités, trouvent conseil auprès de Fidel et inspiration auprès du peuple cubain. Rigoberta Menchu Tum (1992) ainsi que Adolfo Pérez Esquivel 1980), tous deux prix Nobel de la Paix, apportent leur soutien indéfectible à la révolution cubaine et à celle des autres peuples qui s’en inspirent. Gabriel Garcia Marquez, prix Nobel de littérature (1982) est toujours un ami très proche de Fidel tout comme le poète et écrivain Ernesto Cardenal qui y a trouvé son inspiration socialiste.

Pendant ce temps, le peuple de « Papa Doc », Haïti (9.8 millions h.), toujours sous bonne garde de l’Empire, continue dans la pauvreté, la dépendance, la misère, l’analphabétisme et l’absence d’infrastructure et de service de santé pour tous et toutes. Les organismes humanitaires continuent à être sollicités pour répondre aux urgences toujours aussi présentes. Il y a les ouragans annuels qui viennent y semer la mort par centaines et des dégâts matériels qui les laissent souvent dans la boue. Le Président qu’il s’était donné en la personne de Jean Bertrand Aristide a vite été discrédité et mis à la porte par ceux-là même qui ne voulaient pas, dans cette région du monde, d’un autre peuple indépendant, maître de son destin et de ses richesses.

Pendant que la crise économique et financière mondiale met à l’épreuve le système « sacré » du capitalisme, les maisons d’édition n’arrivent plus à répondre à la demande des ouvrages de Karl Marx dont les analyses prédisent, depuis plus de 100 ans, son effondrement. L’individualisme et l’égoïsme qui prennent racines profondes dans tout homme doivent être contenus par des interventions d’États responsables du bien commun et disposant des pouvoirs pour en limiter les effets pervers. En bout de ligne, ce sera toujours la présence de peuples vigilants et mobilisés qui assurera l’intégrité des acteurs à chacun de leurs niveaux.

Ceux et celles qui ont chanté la fin du socialisme peuvent retourner faire leur devoir. Ce qui se passe dans plusieurs pays de l’Amérique latine se répandra dans plusieurs autres régions du monde non pas comme un cancer mais comme l’alternative au capitalisme qui ne peut-être que le reflet de l’individualisme et de l’égoïsme de ceux et celles qui s’en nourrissent. L’ère de la solidarité humaine devient le passage incontournable pour tous ceux et celles qui voudront accéder à un monde nouveau.

Toute mon admiration au peuple cubain et à ses leaders qui on su avancer avec lui sur les voies étroites des obstacles et des défis à relever.

Oscar Fortin, théologien et politologue
Québec, le 3 janvier 2009

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