lundi 28 novembre 2011

LES ARNAQUEURS DE L’ESPRIT





Il y a des arnaqueurs de toute espèce. Les plus connus sont les arnaqueurs à visage découvert qui volent dans une banque ou un commerce. Il y a aussi les arnaqueurs au bon visage et à la parole convaincante. Ces derniers ont mis à l’épreuve des millions de personnes en ce début du présent siècle. Les plus connus dans nos milieux sont ceux reliés à l’Affaire Madoff, qualifiée d’arnaque du siècle, qui avait dépouillé des dizaines de milliers de personnes de leurs fortunes ou, si l’on veut, de leur bas de laine. Plus près de nous, l’Affaire Norbourg, avec Vincent Lacroix, qui était parvenu à flouer les économies de milliers de personnes.

Les arnaqueurs financiers

Qu’ont-ils en commun les fraudeurs de cette espèce ? Ils savent gagner la confiance de leurs clients au point que ces derniers n’hésitent pas à mettre entre leurs mains leur « bas de laine » qui, pour plusieurs, représente l’économie de toute une vie. Que voulez-vous, ces arnaqueurs ont bon visage, leur histoire est ce qu’il y a de plus convainquant et ils sont toujours prêts à jurer sur la tête de leur mère que ce qu’ils disent c’est du solide. Une fois l’arnaque mise à jour, ce sont alors les pleurs, les cris de désespoir, les regrets et surtout découvrir comment ils ont pu se faire rouler par de tels escrocs. Ils diront avoir été naïfs et en un certain sens,  irresponsables.

Une publicité des autorités canadiennes en valeurs mobilières a alors pris l’offensive de mettre en garde les investisseurs contre de pareils escrocs :

« Protégez votre argent contre les fraudes et les escroqueries »

Les arnaqueurs de l’esprit et de la conscience

S’il y  a l’arnaque financière, il y a encore plus grave que celle-là : l’arnaque de l’esprit et de la conscience. Ces deux ressources font de chacun et de chacune de nous des personnes responsables. Elles permettent de voir, de comprendre, d’apprécier, de juger et de décider. Ceux qui parviennent à s’y infiltrer et à en prendre le contrôle deviennent les maîtres du jeu.

Comment pensez-vous être victimes d’arnaqueurs de ce genre ? Ne vivons-nous pas dans un milieu soit disant de liberté où nous pouvons exprimer nos points de vue à qui veut bien les entendre et à recevoir en toute confiance les informations que nos médias nous transmettent avec tout le sérieux des professionnels et professionnelles qui les animent ?  Pour les intellectuels soucieux de vérifier leurs informations transmises par les médias officiels, il y a toujours certains médias, soit disant également, plus sérieux ou crédibles tels Le Devoir, Le Monde et d’autres médias du même genre de nature à conforter l’information reçue.

Nous sommes tous et toutes bien conscients et conscientes que nous dépendons, pour une bonne part, des enseignements que nous recevons dans nos écoles et universités et des informations  que nous transmettent nos médias pour nous faire une idée sur ce qui se passe dans notre monde, dans nos milieux de vie. Ce sera sur la base de ces connaissances que nous assumons  pleinement nos responsabilités en relation des décisions prises par nos dirigeants et nos représentants institutionnels.

Plus l’objet de l’information est loin de nous, ce qui est le cas de toutes les questions reliées aux relations internationales, plus nous dépendons de nos médias pour en savoir quelque chose. Plus cet objet est près de nous, plus facilement nous pouvons en faire le contrôle.

Le problème est que la grande majorité des médias qui ont pour fonction d’informer les populations de l’Occident sont sous contrôles d’empires financiers, lesquels s’alignent avec les politiques des gouvernements dominants de cet Occident.

Pour la grande majorité des Québécois et des Canadiens, de même que pour les populations de l’Europe, la guerre en Afghanistan était ce qu’il y avait de plus justifié et la présence des  armées canadienne, étasunienne et européenne sur ce territoire ne faisait que répondre à un impératif humanitaire et de lutte contre le terrorisme. Il en fut de même pour cette autre guerre, toute récente, en Libye, qui a fait plus de 100 000 morts, en plus de détruire une grande partie des infrastructures de tout un pays. Kadhafi n’avait-t-il pas ordonné l’assassinat de 6000 civils sans défense ? Maintenant c’est la Syrie qui est dans la mire de l’intervention « humanitaire ». Les journaux, les bulletins de nouvelles à LCN et à RDI, ne nous disent-ils pas que le président Assad réprime son peuple et tue à volonté ceux et celles qui réclament un changement de régime ?

Avec un tel message martelé, jour après jour, c’est normal que la grande majorité des canadiens et canadiennes soient invités à célébrer le courage de nos soldats ainsi que celui de ce général Bouchard qui a eu l’honneur de diriger les forces de l’Otan en Libye. Dans leur esprit et conscience ils sont, pour la grande majorité, convaincus de la vérité des messages transmis par leurs médias comme l’étaient les investisseurs face à Madoff et Vincent Lacroix avant de découvrir l’arnaque.

Quelle serait votre réaction si je vous disais que la grande partie de l’information que l’on a semée et continue de semer dans votre esprit et votre conscience n’est qu’un tissu de demi-vérités orchestrées avec des mensonges montées de toute pièce et que les objectifs visés n’ont rien à voir avec la démocratie et l’humanitaire ? Vous serez nombreux à me qualifier de réactionnaire, de complotiste, d’illuminé, de communiste ou de socialiste, d’anticapitaliste et d’anti-impérialiste. Peu se laisseraient interpeller ou oseraient se poser à eux-mêmes la question : « et si c’était vrai ce qu’il nous dit ?»

Mais si ce que je vous dis était vrai, que serait alors votre réaction ? Que diriez-vous à M. Harper au sujet des 35 milliards de dollars destinés au budget militaire et de la participation de nos soldats à ces aventures guerrières? Que diriez-vous aux divers directeurs des médias écrits et visuels qui vous trompent ainsi pour mieux vous manipuler et vous faire taire ? Que penseriez-vous des milliers de civils, hommes, femmes et enfants, tombés sous les bombes de nos avions supersoniques, commandés par le Général Bouchard que nous venons d’honorer de façon particulière à Ottawa ?

Pour ceux et celles qui, de bonne foi, veulent savoir si ce que je dis est vrai ou faux ou gris, je suggère, parmi de nombreuses références sur le sujet, celles qui me semblent les mieux documentées, en relation à la Libye et à la Syrie. Mon objectif n’est pas de vous convaincre mais de mettre à votre disposition des points de vue que nos médias ont choisi de passer sous silence.


Le seul fait de savoir qu’il y a divergences de point de vue et de perception devrait conduire nos journalistes professionnels (les) à confronter ces divergences de manière à permettre aux lecteurs et lectrices que nous sommes tous et toutes de nous former un jugement. Le rôle de l’information n’est-il pas d’apporter les faits et les points de vue les plus divers pour permettre aux citoyens et citoyennes que nous sommes de nous faire un jugement. Les arnaqueurs de l’esprit préfèrent s’emparer de notre esprit en y plaçant le prêt-à-porter qui servira le mieux les intérêts recherchés. Dans ce dernier cas la publicité pour ce type d’arnaqueur devrait être :

Protégez votre esprit contre les mensonges et demi-vérités.

Si vous ne voulez pas être complices du sang versé par nos armes et des injustices commises par nos dirigeants, il nous faut réagir.

Oscar Fortin
Québec, le 28 novembre 2011
http://humanisme.blogspot.com




lundi 21 novembre 2011

ET SI L’HUMANITÉ ÉTAIT ÉGLISE QUELS EN SERAIENT LES SACREMENTS?




Pourquoi pas? Une question que les chrétiens devraient se poser à la lumière du message qui les porte ainsi que les non-croyants à la lumière du sens qu’ils donnent à cette Humanité. Pour les croyants, l’Humanité n’est-elle pas celle en qui le visage de Dieu se révèle et s’exprime progressivement depuis des millénaires? Véritable visage d’une Humanité nouvelle qui se laisse découvrir à l’aurore d’un jour nouveau, toujours plus libérée des ombres de la nuit et de la brume du matin. Teilhard de Chardin, paléontologue du siècle dernier, avait cette vision d’une Humanité en évolution, émergeant de l’opacité de la matière et qui devient toujours plus énergie et vie.

Croyants ou pas, nous sommes de cette humanité et nous participons tous et toutes à son évolution. L’étape qui nous correspond de vivre est sans nul doute une étape charnière. Nous en sommes arrivés à ce que Teilhard appelle l’émergence de la conscience des consciences.

Quels sont les grands problèmes que vit cette humanité de plus de 7 milliards de personnes ? Force est de constater que 1 % de cette grande communauté humaine possède 52 % de toutes les richesses de la terre. Que les pauvres sont toujours plus pauvres et que les riches sont toujours plus riches. Nous constatons que les croyances se multiplient, que les sectes se manifestent avec toujours plus de fanatisme, que les idéologies deviennent de véritables religions alors que d’autres se laissent guider et interpeller par les impératifs du monde dans lequel ils vivent. Ils s’en remettent à leur conscience et à leur courage.

Nous réalisons que le hasard et le destin ne sont pas la seule explication à l’origine de tous les maux. Les analyses nous révèlent qu’il y a les ambitions de pouvoir, portées par la cupidité et la recherche des grandeurs qui en sont arrivées à créer des systèmes leur permettant de tout contrôler des hommes et des sociétés. Quel père, quelle mère, aimant l’humanité, pourraient rester les bras croisés devant autant d’ignominie et de souffrance ?

Aussi paradoxal que cela puisse paraître, les temps qui sont les nôtres et auxquels nous sommes participants ne comportent pas qu’un côté sombre aux effets pervers. Il y a cette poussée de vie, un peu comme celle qui surgit à travers les douleurs de l’enfantement.

Un regard rapide sur ce qui se passe actuellement dans le monde nous révèle un réveil des peuples qui n’acceptent plus de s’accommoder de systèmes politiques, économiques, sociaux qui ne répondent pas à ce qu’ils sont et espèrent. Il y a le printemps arabe, le M-15 en Espagne, les « indignés » en Europe et aux États-Unis, les manifestations étudiantes au Chili qui reçoivent l’appui de ceux de l’Argentine et du Mexique. Il y a la conscience des peuples émergents en Amérique latine qui proclament haut et fort qu’il y a une autre manière de faire la politique et de diriger le monde. Les problèmes de corruption sont dénoncés et les politiciens véreux montrer du doigt. Tous ces mouvements sont portés par l’espérance d’une humanité nouvelle. Une nouvelle conscience, cette fois au niveau planétaire, prend forme et se manifeste

Nous sommes cette humanité qui vit ces douleurs de l’enfantement. Les maîtres de ce monde ne s’en réjouissent pas et voudraient bien procéder à son avortement en recourant à la puissance des armes, à la menace de tortures et d’emprisonnement, en faisant taire les dénonciateurs et dénonciatrices.

Nous ne pouvons plus vivre en faisant abstraction de ces 7 milliards d’humains. Ils sont nous, nous sommes eux. Pour le chrétien c’est la catholicité dans ce qu’elle a de plus existentielle et de plus interpellant. Pour le non-croyant c’est l’humanité dans ce qu’elle a de plus respectable. Pour les uns et pour les autres, ce sont des frères, des sœurs, des compagnons, des compagnes. Le « Qu’as-tu fait de ton frère ? », demandait Dieu à Caïn, devient une interpellation qui s’adresse à la conscience de chacun et chacune de nous. Pour le non-croyant, tout imprégné de justice, de vérité, de solidarité, cette humanité à construire lui tient tout autant à cœur. Nous n’en sommes plus aux offices des temples, faits de pierres, mais aux offices d’engagements qui changent le monde.

Si les puissances de domination sont fortes, celles de la résistance et de la dénonciation le deviennent de plus en plus. Les mensonges avec lesquels ils manipulent les peuples s’évaporent à la lumière d’une vérité qui n’abdique pas. La cupidité, recouverte des vertus de charité et d’humanité, se révèle dans toute sa nudité. Le monde a changé, mais la conscience qui traverse ce monde est la synergie nouvelle qui fait passer l’humanité de la dépendance des grands et puissants à celle de la solidarité et de la liberté partagée des humbles de la terre.

Cette nouvelle humanité en marche est désormais dominée par des pôles qui en retiennent toutes les parties unies et vivantes. Ces pôles peuvent se ramener à ce qui a toujours été présent dans l’histoire de l’humanité, mais jamais de façon aussi consciente et universelle. Pour certains, ils seront les « sacrements de la vie » et pour d’autres les grands repaires éthiques, permettant d’éviter les dérapages tout en engageant pour le développement de l’humanité. En voici sept qui m’apparaissent les plus fondamentaux et universels.

La VÉRITÉ

Que de tricheries et de mensonges éclatent au grand jour. Les maîtres sorciers capables de déguiser les mensonges en vérité se retrouvent toujours plus dépourvus de leur pouvoir de tromper. Ils sont vite démasqués et renvoyés à leurs tricheries. Les guerres se font et se défendent avec des mensonges consciemment calculés et bien enveloppés. Ce temps de la tromperie a atteint ses limites tout comme l’obscurité de la nuit atteint ses limites à l’arrivée de l’aurore. Pratiquer la vérité et dénoncer les tricheries devient un signe de conformité avec l’humanité.

La JUSTICE

Au nom d’une soi-disant liberté, les maîtres de ce monde ont transformé les lois fondamentales de la justice humaine en des lois leur assurant tous les pouvoirs pour piller, exploiter, spéculer en toute justice. Ce n’est certes pas de celle-là dont il est question.  Lutter contre ces dérives est faire acte d’humanité tout autant que de chrétienté.

LA SOLIDARITÉ

Il y a la solidarité des grands et des puissants dont la solidité repose sur des liens d’intérêts, d’ambitions, de conquêtes fortement alimentés par la corruption, la tricherie et la manipulation. La solidarité humaine est toute autre. Elle repose sur des liens de gratuité, de respect, de bonté, de vérité, de justice, de partage et de compassion. C’est de celle-là qu’il faut se nourrir et ce sera en vivant celle-là que nous ferons œuvre d’humanité.

LA CATHOLICITÉ

Non pas celle d’une religion ou d’une croyance, mais celle qui interpelle toute personne de bonne volonté quant à la portée de ses engagements humains. Il y a le regard qui se limite à notre environnement immédiat, mais il y a aussi le regard qui embrasse l’humanité entière, du plus petit au plus grand, du plus riche au plus pauvre, du plus intelligent au moins intelligent, etc. La catholicité est ce qui nous oblige à dépasser nos individualités pour rejoindre, quelque part, cette humanité en gestation en chaque être humain et à laquelle nous sommes étroitement associés. La catholicité est inclusive et non exclusive.

LA VIE

Je suis toujours fortement interpellé par le fait de ces mouvements qui s’élèvent contre l’avortement en proclamant haut et fort la défense de la vie des fétus tout en étant des partisans ce ces guerres qui tuent par centaines de milliers, hommes, femmes et enfants. Être pour la vie c’est être contre toutes les guerres qui tuent et pour toutes les voies de dialogue qui permettent de résoudre les problèmes. Être pour la vie c’est également en rendre possible tout le développement et son éclosion dans le monde de la communauté humaine. On ne peut être pour la vie et se solidariser de systèmes qui engendrent la pauvreté, les famines qui, elles, tuent par centaines de millions de personnes par années.

LA LIBERTÉ

Il y a la liberté des anarchistes, des oligarchies, des individus, des groupes, qui empiètent quelque part sur la liberté des autres. La liberté dont il est question, ici, est celle qui se nourrit de la liberté de tous les autres humains. Le véritable artisan de la liberté ne saurait être pleinement libre sans que ne le soit  le dernier des humains. Nous sommes loin de la liberté que représente la médaille de la liberté avec laquelle les puissants de ce monde honorent ceux et celles qui leur facilitent cette liberté construite sur la domination des autres.

L’AMOUR

Ce mot « amour » résume et dit tout à la fois les six grandes références antérieures. Il en est l’inspiration et le couronnement.  Aimer c’est laisser entrer en soi l’humanité dans tout ce qu’elle est et dans tout ce qu’elle porte. C’est l’apprivoiser et s’y laisser apprivoiser. Comme l’écrivait St-Exupéry, « on ne connaît bien qu’avec les yeux du cœur. »

EN CONCLUSION

Nous voilà arrivés à cette HUMANITÉ, unique et véritable COMMUNAUTÉ des hommes et des femmes qui l’incorporent. Pour les chrétiens, là est la maison de Dieu, pour les non-croyants, là où est la vie dans ce qu’elle a de défi, de dignité et de raison d’être. Dans un cas comme dans l’autre nous sommes tous et toutes interpellés par les sept sacrements de l’humanité.

Oscar Fortin
Québec, le 21 novembre 2011


samedi 19 novembre 2011

LES DEUX GRANDES DÉMOCRATIES REPRÉSENTATIVES


LES DEUX GRANDES DÉMOCRATIES REPRÉSENTATIVES


LE PEUPLE AU POUVOIR



Jeudi dernier, je me suis rendu à une table ronde où des invités, choisis  minutieusement pour leur fidélité aux politiques néolibérales du nord, présentaient un bilan des dix années de la Charte démocratique  interaméricaine, intégrée à l’Organisation des États américains (OEA).

Les panélistes ont eu l’habileté de parler pendant plus d’une heure et demie, sans mentionner une seule fois l’UNASUR, comme expérience d’intégration des États de  l’Amérique du Sud et une expression de liberté et de démocratie, de l’ALBA, comme alternative au Traité de libre échange des pays du nord. À peine a-t-on fait allusion à la CELAC, peu définie dans leur esprit, qui consiste à réunir, sans la présence des Etats-Unis et du Canada, la Communauté des États des Caraïbes et de l’Amérique latine. Sa création comme organisme continental est cédulée pour les 2 et 3 décembre prochain au Venezuela. Quant à la Charte sociale des Amériques qui s’intègre également à l’OEA, elle aura été, à toute fin pratique, ignorée.

De la part d’universitaires chevronnés et d’un journaliste qui couvre la réalité de l’Amérique latine depuis des années au nom de la Société Radio-Canada, ces oublis demeurent quelque peu suspects, d’autant plus que leur rappel aurait permis de jeter un regard nouveau sur la dynamique démocratique qui enflamme de plus en plus les pays du Continent.

On a plutôt mis en relief le rôle primordial et irremplaçable de l’OEA, seule plateforme continentale de concertation. Pas un mot sur sa partialité qui en fait, pour plusieurs, un outil dominé par l’influence des Etats-Unis et le Canada, véritable valet de Washington.

Le temps, laissé pour les interventions  de l’auditoire, a été limité à neuf minutes ou à peu près. Je me suis présenté le premier, m’assurant ainsi, d’une minute ou deux pour exprimer mon point de vue et terminer en posant une question. J’ai évidemment relevé les oublis plus haut mentionnés, fait ressortir l’importance de la rencontre de tous les Présidents des Caraïbes et de l’Amérique latine, les 2 et 3 décembre prochain, et rappelé le caractère tout à fait exceptionnel de la Charte sociale des Amériques et du contrôle exercé par le comité permanent de l’OEA pour qu’elle ne soit pas entérinée trop vite par tous les membres. Depuis 2005, l’OEA en a été saisi. Depuis 2007,  elle a été acceptée comme document à être entériné par chacun des États. Dans le cadre de cette intervention, j’ai tout simplement relevé le fait que le Comité permanent est présidé par le Canada et que les 4 Vice-Présidences sont assumées par les Etats-Unis, la Colombie, Dominique et la République dominicaine. De quoi comprendre que cette Charte, proposée par Chavez et secondé par tous les pays émergents de l’Amérique latine en soit encore à l’étape des études.

Le Président de cette table ronde, m’indiquant que mon temps était écoulé, je lui signifié que j’avais deux questions.  

1.    Est-ce que l’OEA, comme outil indépendant au service de tous les pays de l’Amérique latine, des Caraïbes, du Canada et des Etats-Unis, a toujours la crédibilité de l’ensemble des 34 pays qui la composent?

2.    Peut-il y avoir conciliation entre les démocraties représentatives des intérêts oligarchiques et celles qui représentent les intérêts des peuples?

À la première question, ils ont rappelé qu’il n’y avait pas d’autres organismes à l’échelle continentale pouvant jouer le rôle de l’OEA. Aucun n’a fait allusion à la CELAC qui sera une véritable alternative à l’OEA, sauf que les Etats-Unis et le Canada n’en feront pas parties. Un panéliste s’est même demandé si l’Amérique latine et les Caraïbes pouvaient se passer des Etats-Unis. L’occasion de répondre à cette question n’a pas été donnée aux intervenants. Si c’eût été le cas, j’aurais posé la question à l’inverse, à savoir si les Etats-Unis pouvaient se passer de l’Amérique latine.

À la seconde question, personne n’a répondu, choisissant plutôt d’en esquiver les implications que leurs réponses auraient pu avoir.

Nous savons que la démocratie, tant et aussi longtemps qu’elle est sous le contrôle des oligarchies et qu’elle sert bien leurs intérêts, constitue le modèle par excellence de la gouvernance des États. Par contre, dès que la démocratie devient sous le contrôle des peuples et qu’elle sert bien leurs intérêts, alors elle devient pour les oligarchies  de véritables dictatures, violant leurs libertés individuelles et leurs droits humains. Regardons comment ces oligarchies et ceux et celles qui les servent  traitent Hugo Chavez, Évo Morales, Raphael Correa, Daniel Ortega. Ils sont les présidents qui ont le plus élevé pourcentage de soutien des peuples qu’ils représentent. S’ajoute, évidemment à ces derniers, Cristina Fernandez qui vient de battre tous les records en obtenant près de 65% de tous les électeurs et électrices de l’Argentine.

Pas surprenant que nos panélistes se soient abstenus de mentionner les coups ou tentatives de coup d’État militaire visant à renverser des gouvernements légitimement élus. Ce qui fut le cas le 11 avril 2002, au Venezuela, en 2008, en Bolivie, le 29 juin 2009, au Honduras et en septembre 2010, en Équateur. Pas surprenant qu’ils aient écorché Hugo Chavez, type mouton noir qui cultive le culte à la personnalité. Il est plutôt un des grands leadeurs au centre de ce combat de la conscience solidaire et responsable des peuples.

L’information que nos élites véhiculent dans nos universités et sur nos réseaux de communication est celle qui sert à  merveille la démocratie des oligarchies et qui noircit, autant faire se peut, la démocratie qui se nourrit des peuples pour servir les peuples. Rien, vraiment rien pour informer le citoyen que nous sommes.

Oscar Fortin
Québec,  le 19 novembre 2011










mardi 15 novembre 2011

SIGNES DES TEMPS


SIGNES DES TEMPS



Lorsque nous voyons le ciel s’obscurcir et de gros nuages noirs se gonfler au dessus de  nos têtes, nous disons qu’il va y avoir un orage nourri d’éclairs et de coups de tonnerre. Nous reconnaissons ainsi les signes du temps qui s'en vient. Il en va de même pour les signes qui annoncent la fin d’une époque, d’un régime, d’un monde.

Des guerres, des tremblements de terre, des tsunamis, des épidémies de toute nature ont existé et existeront toujours. À chaque époque les populations pouvaient y voir des signes de la fin du monde si ce n’est celle de leur propre monde. Ce qu’il y a de changé, aujourd’hui, c’est que, d’une part, la globalisation de certains phénomènes comme ceux de l’économie, des finances, de l'information et des guerres, et, d’autre part, l'existence d'armes suffisamment puissantes pour détruire l’humanité entière n'interpellent plus seulement un peuple ici ou là, mais toutes les personnes de bonne volonté. Dans ce monde globalisé, plus rien ne nous est étranger et ne peut nous laisser indifférents.

C’est dans ce monde globalisé que des voix s’élèvent pour pointer du doigt des signes  présageant des pires catastrophes qui attendent l’humanité. Si les hommes et les femmes de toutes les nations et de tous les peuples n'interviennent pas pour arrêter le bras de ces belligérants aux ambitions illimitées, le risque sera fort élevé pour que la catastrophe s'abatte sur l,humanité entière. Les armes nucléaires et celles de destruction massive débordent les frontières de nos villages, de nos villes de nos pays. Elles ont une puissance pouvant exterminer tout ce qu’il y a de vie sur la planète terre.  Ces armes, aux mains d’hommes politiques à la morale taillée à la mesure de leurs ambitions de domination et de conquête, sont une menace toujours plus réelle à la survie de l’humanité.

Dans ce contexte, les menaces toujours plus persistantes d’Israël d’attaquer l’Iran rendent l’éventualité d’une guerre totale encore plus plausible, d’autant que l’Iran a fait savoir que toute action belliqueuse à son endroit serait suivie d’une réplique énergique  contre ses auteurs. Si Israël dispose déjà de tout l’arsenal des armes nucléaires, l’Iran, qui se défend toujours d’avoir pareille arme, n’est pas sans disposer d’armes très sophistiquées pour répliquer avec toute la vigueur de ces dernières.

Fidel Castro et Chavez sonnent l’alarme sur les dangers réels d’une telle confrontation. Déjà, avant même que débute la mission humanitaire qui a fait 100 000 morts en Libye, ils avaient demandé que la communauté internationale envoie sur place une délégation crédible de représentants pour voir les faits et régler par les voies diplomatiques et politiques les différents existants. Autrement, avaient-ils dit, ce serait par milliers qu’il faudrait compter les morts d’innocentes victimes. Les belligérants passèrent outre à ces recommandations, pressés qu’ils étaient de renverser le régime de Kadhafi. Nous connaissons la suite.

Aujourd’hui, ces derniers reprennent la parole, non plus pour dire qu’advenant un conflit entre Israël et l’Iran ce sera par  milliers qu’il faudra compter les morts, mais plutôt pour déclarer que ce sera l’existence même de l’humanité  qui sera menacée par l’usage éventuelle des armes nucléaires et de destruction massive. Voici ce qu’écrit Fidel dans ses dernières réflexions  « Suicide génocidaire » (1):

« Je me sens le devoir de transmettre à ceux qui prendront la peine de lire ces Réflexions l’idée suivante : nous avons tous l’obligation, sans exception, de faire prendre conscience à l’humanité des risques de catastrophe définitive et totale qu’elle court à cause des décisions irresponsables de politiciens aux mains desquels le hasard, plus que les talents ou les mérites, a fait tomber son sort. »

Dans la deuxième partie de ses réflexions, parlant de l’Iran, il dit ceci : (trad. de l’auteur.)

« Par sa capacité de lutte, le nombre de ses habitants et l’étendue de son territoire, une agression contre l’Iran n’aurait aucune similitude avec les aventures belliqueuses d’Israël en Irak (1981) et en Syrie (2007). Une guerre sanglante éclaterait inévitablement. Sur ce point il n’y a pas de doute possible. » (traduction de l’auteur)

On se souviendra qu’Israël avait détruit en 1981 le réacteur nucléaire dont s’était doté le gouvernement de Saddam Hussein. Il en fut de même en Syrie, en 2007. Deux opérations militaires qui ne donnèrent pas lieu à une guerre sanglante. Fidel avertit la communauté internationale et les principaux belligérants que dans le cas de l’Iran tout sera fort différent.

La Chine dit qu’il faut donner priorité à l’approche politique et aux voies diplomatiques pour résoudre ce problème. La Russie dénonce le dernier rapport de l’AIEA qui n’est qu’un ramassis d’information déjà compilées, mais non fondées sur des preuves solides. Il ne fait que répondre aux attentes politiques des Etats-Unis et d’Israël pour justifier une intervention militaire. Elle assure qu'elle fera pour dissuader les belligérants d'attaquer l'Iran.

Mon grand-père, lorsqu’il disait de faire vite pour entrer le foin avant que n’arrive la pluie, il disait vraie. Il avait vu les signes dans le ciel et à peine le foin entré dans la grange, la pluie commençait. Le vieux Fidel en a vu passer des présidents et des hommes politiques. Il a eu le temps d’en mesurer les ambitions tout autant que leurs bonnes dispositions. Aujourd’hui, il nous dit de faire vite si nous voulons sauver le monde d’un désastre irréversible. Il entend déjà le tonnerre et voit des éclairs qui se rapprochent. Espérons que nous arriverons à temps à la grange de la raison pour mettre l’humanité à l’abri de la folie guerrière.

Oscar Fortin
Québec, le 15 novembre 2011




jeudi 10 novembre 2011

L’ÉTAT AUTANT QUE NÉCESSAIRE, LE PRIVÉ AUTANT QUE POSSIBLE


MAIS JAMAIS LE CONTRAIRE



Pendant que dans les pays du nord le refrain des hommes politiques et des oligarchies économiques et financières  clame haut et fort le démantèlement de l’État au profit du « privé »,  dans les pays émergents, le refrain est plutôt de renforcer l’État de manière à lui permettre d’harmoniser toutes les forces productives et toutes les richesses du pays au service prioritaire  du « bien commun » de l’ensemble de la société.  Pour ces derniers l’État est pour la société ce qu’est l’autorité parentale pour la famille. Le patrimoine national doit être géré pour le bien de tous et toutes.

LES POUVOIRS DE L’ÉTAT SOUS CONTRÔLE OLIGARCHIQUE

Nous réalisons de plus en plus que derrière les démocraties que nous ventons et dont nous nous faisons les promoteurs à travers le monde se profilent des intérêts privés dont la pleine sécurité repose sur le contrôle des divers pouvoirs dont dispose l’État. Leur main mise sur les pouvoirs politiques, législatifs et judiciaires leur permet de les orienter de manière à ce qu’ils répondent prioritairement à leurs intérêts.  Peu leur importe les incidences négatives que ces intérêts peuvent avoir sur le bien commun de l’ensemble de la société. Comme ils disent, elles ne sont pas là pour faire la charité ou s’occuper du mieux être des populations. Elles sont là pour elles-mêmes et leurs alliés.

L’histoire de nos démocraties à l’occidentale démontre avec toujours plus de clarté cette prise de contrôle de l’État par des oligarchies, toute dévouées aux intérêts privés de leurs membres. Elles seront là pour financer les partis politiques, pour diriger le choix des candidats acceptables et leur apporter tout le soutien médiatique indispensable à la conquête des diverses fonctions de l’État.

Elles seront également là pour orienter les législations et la fiscalité de manière à leur assurer l’accès aux richesses du pays et à leur exploitation aux moindres coûts. Elles pourront bénéficier de généreuses subventions et de multiples services d’infrastructure que l’État assumera à même les impôts de ses contribuables.

Tout cela est évidemment présenté sous des dehors où les principaux bénéficiaires deviennent de véritables bienfaiteurs, assurant du travail à des centaines de travailleurs et permettant le développement économique et industriel des régions et du pays tout entier.

Le discours officiel ne dira jamais, par contre, que l’État met à la disposition des entreprises l’énergie productive des travailleurs, principaux créateurs de la richesse ainsi qu’un nombre incalculable de bénéfices en subventions, en fiscalité et en infrastructures.

Lorsqu’arrive les temps de crise, comme ceux que nous vivons actuellement, ces mêmes oligarchies, accrochées aux multiples subsides de l’État et bénéficiaires des lois fiscales les plus généreuses à leur endroit se font les apôtres du démantèlement de l’État social au profit de l’État entièrement privatisé.

LES POUVOIRS DE L’ÉTAT SOUS CONTRÔLE POPULAIRE

Dans les pays émergents de l’Amérique latine le balancier du contrôle des pouvoirs de l’État passe du pouvoir des oligarchies à celui des peuples. Ces derniers se réapproprient la démocratie dans son sens le plus vrai « le pouvoir du peuple par et pour le peuple ». Ils passent de la « démocratie représentative » à la « démocratie participative ». Dans les faits ça veut dire que dans le premier cas, une fois les élections terminées, comme c’est le cas dans nos pays,  les élus (es) font à peu près ce qu’ils veulent, d’où la grande latitude de oligarchies pour y régner en maitres. Dans le second cas, des dispositifs constitutionnels et du fait même contraignants, permettent au peuple d’intervenir à tout moment. Il peut le faire soit à travers ses associations, ses regroupements et ses syndicats pour corriger le tir de ses dirigeants, soit directement par référendum, pour les destituer. Il n’y a pas de chèque signé en blanc remis aux élus. Ils doivent rendre des comptes et assumer des décisions en conformité avec la volonté de leur peuple.

Ce renversement des pouvoirs ne se fait pas sans que les anciens maitres des pouvoirs de l’État fassent des pieds et des mains pour qu’il n’en soit pas ainsi. Tout sera utilisé pour empêcher ces nouveaux venus, que sont finalement les peuples, de reprendre le contrôle de leur État. Leurs dirigeants seront diabolisés, diffamés et même assassinés. Dès que des correctifs seront apportés à des législations qui avaient pour finalité de protéger leurs privilèges, ils crieront à l’atteinte aux libertés fondamentales et mettront à contribution leurs propres commissions des droits de la personne pour élaborer des dossiers fondés sur des demi-vérités si ce n’est sur des mensonges inventés de toute pièce. Dans la majorité des cas, les oligarchies nationales et internationales provoqueront des tentatives de coups d’État militaires. La voie démocratique, prêchée avec tellement de conviction lorsqu’ils en contrôlaient tous les rouages, ne les sert plus là où les peuples ont compris leur mascarade. Ce fut le cas au Venezuela en 2002, en Bolivie, en 2008, au Honduras, en 2009, en Équateur, en 2010. Le seul à avoir réussi est celui du Honduras. Dans les autres cas, la vigilance du peuple a fait échouer ces opérations terroristes menées avec le soutien de Washington.

QUEL EST DONC LE PÉCHÉ DE CES GOUVERNEMENTS

Dans tous les cas il s’agit de gouvernements démocratiquement élus avec un fort appui populaire. Leurs dirigeants ont fait allégeance au principe selon lequel l’État est le responsable du Bien commun et qu’il lui revient de prendre tous les moyens mis à sa disposition  pour atteindre cet objectif. Pour faire court, ces objectifs du bien commun portent sur les éléments de base permettant d’assurer la santé, l’éducation, l’alimentation, le logement, la sécurité et le développement de l’ensemble de la société. Il est le garant de la gestion des richesses du pays et de la mise en place des ressources nécessaires à la réalisation de ce mandat.  Sa clientèle prioritaire est et demeure le peuple dans toutes ses composantes.

Il est évident que le passage d’un « bar ouvert » où les multinationales et les oligarchies puisaient à volonté dans les richesses du pays sans y laisser la rente correspondante aux valeurs de ces  dernières, à un « bar contrôlé » par  l’État qui ne leur permet plus de faire ce qu’ils veulent, n’est pas de nature à leur plaire beaucoup. Ces oligarchies accuseront ces gouvernements de communistes, de marxistes, de dictatoriaux pour le seul fait d’être mis au pas de la justice sociale et des impératifs du Bien commun de la société.

L’État qui prend au sérieux son mandat de gérer en bonne autorité parentale le bien commun de toute la famille devient suspect dès qu’il fait passer au second plan les intérêts des oligarchies nationales et internationales. Ces dernières préfèreraient que ce soit plutôt « le privé autant que nécessaire et l’État autant que possible ».  Elles devront toutefois se résigner au fait que « le moi, premier servi » des oligarchies devienne le « moi premier servi » du peuple.

Le mouvement des indignés à travers le monde ne fait que relever cette grande tricherie dont sont victimes les peuples. Le seul fait d’en prendre conscience génère déjà les énergies pour en chercher l’élimination.


Oscar Fortin
Québec, le 9 novembre 2011
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