jeudi 26 février 2015

LE VENEZUELA DANS LA TOURMENTE DE L'INTERVENTIONNISME


LE VENEZUELA DANS LA TOURMENTE



UN PEUPLE CONFRONTÉ À L’EMPIRE

En tout premier lieu, le Venezuela est un pays de l’Amérique du Sud qui fonctionne sur la base d’une Constitution que le peuple vénézuélien a acceptée majoritairement lors d’un référendum en 1999. Cette constitution consacre la séparation des trois grands pouvoirs de l’État : exécutif, législatif et judiciaire. Il s’agit donc d’un État de droit, régi selon les dispositions de cette Constitution du peuple. Une place importante y est faite à la participation du peuple dans l’exercice du pouvoir. C’est ce qu’on appelle la démocratie participative.

Cette démocratie participative se distingue des démocraties représentatives par le fait que le peuple et ses intérêts passent avant ceux des oligarchies dominantes de la société. Dans les démocraties représentatives, le citoyen et la citoyenne vont voter et donnent pour ainsi dire un chèque en blanc pour la durée du mandat à ceux et celles qui seront élus. Ces derniers pourront, à la limite, disposer des pouvoirs de l’État comme bon leur semble. En général, les constitutions des pays qui se font les défenseurs de la démocratie représentative ont été rédigées et votées par eux-mêmes. Les peuples concernés n’ont pas eu leur mot à dire.

Au Venezuela, le peuple, à travers divers regroupements,  est impliqué dans la définition des grandes orientations des politiques gouvernementales. Le peuple est le lobby le plus important et celui auquel s’attache le plus le gouvernement. Il y a au Venezuela une mobilisation extraordinaire du peuple qui se manifeste et qui fait entendre sa voix. Ce sont les agriculteurs, les travailleurs, les femmes, les personnes âgées, les jeunes, etc. à qui le gouvernement ouvre ses portes, mais aussi auprès desquels il se fait intensément présent. Il y a pour ainsi dire un lien organique, entre le peuple et ses gouvernants, qui s’enracine dans le partage d’intérêts communs.

Cette démocratie du peuple, par et pour le peuple, fait mal a ceux et celles qui s’étaient approprié du mot « démocratie » pour faire des pouvoirs de l’État un pouvoir au service de leurs intérêts. Bien camouflés derrière les apparats de la démocratie et du bien commun, ces dirigeants se mettaient entièrement à la disposition de ceux et celles qui les avaient conduits à ces fonctions. En général, ce cheminement vers le pouvoir était relativement simple. D’abord un système électoral pas trop scrupuleux sur les normes et les votes, puis suffisamment d’argent pour faciliter des prises de décision des électeurs et électrices. Une fois en place, le paiement des redevances des commanditaires commence. Les richesses naturelles du pays seront remises non pas au plus offrant, mais au plus généreux dans ses pourboires. On se gardera de ce que le peuple en sache le moins possible, rendant l’accès à l’éducation plus dispendieuse. Le système devra permettre suffisamment d’alimentation pour que le travailleur et la travailleuse aient suffisamment d’énergie pour produire, mais pas trop pour en demander davantage.

Au Venezuela, avec l’arrivée de Chavez ,en 1998, puis avec la nouvelle Constitution en 1999, ce scénario a été changé. Le peuple reprend son pouvoir pour servir d’abord et avant tout ses intérêts qui sont ceux du Bien commun. Rien pour plaire aux usurpateurs de la démocratie qui en avait fait une couverture pour leurs méfaits. La bourse et le pouvoir ont changé de mains. Le peuple et son gouvernement ont pris la bourse et le pouvoir.

Depuis ce jour, ces oligarchies et l’oncle Sam ne peuvent accepter que les revenus du pétrole leur échappent et que les pouvoirs exécutifs, législatifs et judiciaires ne leur obéissent plus. Coups d’État, référendum révocatoire, élections par dessus élections, campagnes nationales et internationales pour discréditer, diaboliser, cette démocratie du peuple pour et par le peuple, rien n’y fit. Le Peuple et son gouvernement résistent. Pourtant, leurs adversaires ne lâchent pas.

En janvier dernier, ces adversaires ont créé la rareté des biens essentiels en gardant dans des entrepôts des centaines de milliers de tonnes de ces biens tout en imputant, per leurs médias, la faute au Gouvernement de Maduro, dans le but, évidemment, de soulever le peuple contre son gouvernement. Beaucoup de ces biens ont également servi à alimenter un marché au noir devenu plus que florissant. Il en fut de même avec les réseaux de contrebande qui en faisaient passer des tonnes du Venezuela à Colombie.

Le peuple a su résister et ne pas se laisser emporter par la propagande et les frustrations générées par cette rareté.

Ce ne fut que parti remise. En février, plus précisément les 11 et 12 février,  un coup d’État était démantelé par le Gouvernement. Il s’agissait d’un coup d’État planifié sur le modèle de celui du Chili, en 1973, pour ce qui a trait aux bombardements aériens, et de celui d’avril 2002, à Caracas, pour ce qui a trait au gouvernement de transition. C’est avec la collaboration de quelques militaires que des bombardements allaient détruire le Palais présidentielle de Miraflores, attaquer le centre d’information et de diffusion Télésurtv , le ministère intérieur et un quartier de la population de Caracas, dans ce dernier cas,  pour semer la terreur auprès de la population. Informé de ces évènements à venir, le gouvernement a procédé, le 11 février, à l’arrestation de certains des militaires impliqués, lesquels ont révélé la totalité du plan dans lequel ils s’étaient compromis.

Toutes ces informations ne sortent pas dans nos grands médias. On s’alimente plutôt des mensonges d’une propagande devenue grossière tellement elle s’éloigne de ce qui peut avoir un semblant de vérité. Même l’Épiscopat vénézuélien participe à ces opérations de dénigrement du gouvernement et de désinformation de ce qui se passe réellement au Venezuela. Il agit comme une véritable agence des Etats-Unis dans le pays. Dans le cas de la crise provoquée par la guerre économique de janvier, il savait très bien qui étaient les responsables de la rareté de ces biens dans les centres de distribution, mais il n’en continua pas moins à imputer au gouvernement la responsabilité de cette crise.

Au Venezuela existent une Constitution et des procédures qui permettent de se défaire d’un dirigeant qui n’est pas à la hauteur de ses fonctions. Cette procédure est celle du référendum révocatoire dont peu d’États disposent. C’est une alternative pour l’opposition vénézuélienne de sortir le président Maduro de sa charge de Président. Il y a également des élections législatives qui sont prévues pour cette année. Une autre occasion pour l’opposition de s’imposer par la voie électorale comme majorité au Parlement.

Au Venezuela, c’est le Peuple qui décide. Ce ne sont ni les oligarchies, ni Washington qui décide, mais le Peuple. Si les mécontents et les insatisfaits se retrouvent en minorité, qu’ils prennent leur mal en patience en s’accommodant au régime de droit existant, sinon qu’ils prennent le maquis et qu’ils en en subissent  les conséquences. Qu’ils ne viennent surtout pas se faire passer pour les défenseurs de la démocratie alors qu’ils en sont les saboteurs. Aucun État se disant démocratique ne peut accepter que des groupes se présentent en toute impunité avec l’arme de la violence pour renverser un gouvernement légitimement élu. Des sanctions très sévères sont prévues pour ce type de personnes et d’organisations. Ce sont, à toute fin pratique, des terroristes à visage découverts.

Si ces adversaires du président Maduro sont si convaincus du bien-fondé de leurs qu’ils s’adressent aux tribunaux ou qu’ils aillent convaincre le peuple de leur point de vue. Ce n’est ni le pape ni Obama qui résoudront ce problème. Au Venezuela, l’arbitre suprême c’est le peuple. Cette référence est d’autant plus fiable que le Venezuela peut compter sur un système électoral qui laisse très peu d’espace à la fraude et à la tricherie, un des meilleurs au monde selon la Fondation Carter. Le vote déposé dans les urnes est celui qui est compté. Les Mexicains et bien d’autres peuples aimeraient bien avoir un tel système, mais ça ne leur sera possible qu’avec une nouvelle Constitution écrite par le peuple et pour le peuple.

Je termine en invitant tous les opposants qui se présentent pour de grands démocrates d’aller à la rencontre du peuple pour les convaincre de voter pour eux. Vos appels à Obama et au Pape ne sauront remplacer vos appels au Peuple. C’est lui qui, en dernière instance, décide.  C’est ce qu’on appelle la démocratie.

Oscar Fortin
Le 26 février 2015




dimanche 22 février 2015

LA PROSTITUÉE DE L’APOCALYPSE





Le livre de l’Apocalypse est porteur de révélations présentées à travers des symboles et des images pas toujours faciles à comprendre. Il faut croire qu’elles sont là, comme des phares, pour nous guider sur cette longue route conduisant l’Humanité vers la fin des temps. Il est important de noter que cette fin des temps ne marque d’aucune manière la fin de l’Humanité. Tout au contraire, elle lui ouvre toute grande les portes d’un ciel nouveau et d’une terre nouvelle

« Et j`entendis du trône une forte voix qui disait : « Voici la maison de Dieu avec les hommes! Il habitera avec eux, et ils seront son peuple, et Dieu lui-même sera avec eux. Il essuiera toute larme de leurs yeux, et la mort ne sera plus, et il n`y aura plus ni deuil, ni cri, ni douleur, car les premières choses ont disparu. » Ap.21, 3-4

Nous n’en sommes évidemment pas encore là et les temps que nous vivons en ce début du 21e siècle nous plongent dans la tourmente des guerres, des famines, des ambitions de pouvoirs et de domination, du mensonge édifié sur le socle de la vérité. Tous ces évènements jettent un éclairage particulier sur ces révélations qui touchent particulièrement les derniers temps de cette longue histoire. Je voudrais m’arrêter, dans le présent texte, à cette prostituée et à cette Babylone dont nous parle l’Apocalypse au chapitre 17.

« Cette femme était vêtue de pourpre et d`écarlate, et parée d`or, de pierres précieuses et de perles. Elle tenait dans sa main une coupe d`or, remplie d`abominations et des impuretés de sa prostitution. Sur son front était écrit un nom, un mystère : Babylone la grande, la mère des impudiques et des abominations de la terre. » Ap.17, 4-5

Les historiens et exégètes ne s’entendent pas sur l’identification de cette prostituée pas plus que sur celle de cette Babylone. Il y a toutefois une tendance forte qui reconnaît, dans cette prostituée, l’Église de Rome. Sur cette question, je vous réfère à cette analyse.

Aux fins du présent article, j’aborderai ce sujet par le biais des deux pactes secrets  entre le Vatican et Washington, conclus, le premier, en juin 1982, et le second, en mars 2014. Dans une première partie, j’aborderai le Pacte signé en juin 1982 par le pape Jean-Paul II et le président Reagan. Dans une seconde partie, je traiterai du pacte signé entre le pape François et le président Obama.

Le Pacte du 7 juin 1982

Si nous pouvons en parler aujourd’hui, c’est qu’avec les années beaucoup d’éléments de son contenu en ont été révélés. Je me permets, pour en traiter, de citer de larges extraits d’un excellent article d’Eduardo Febbro qui en fait un bon résumé.

« Le premier pacte a été scellé le 7 juin 1982 dans la bibliothèque du Vatican entre l’ex-président étasunien Ronald Reagan et le pape de l’époque Jean Paul II. Ce pacte, connu sous le nom de “Sainte Alliance” doit son existence à l’un des personnages les plus sombres de la diplomatie du Vatican : Pio Laghi, ex-Nonce apostolique en Argentine (1974-1980) et artisan, dans les années 80, de la reprise des relations diplomatiques entre le Saint-Siège et Washington. Laghi était un homme de robe, ambiguë et à la main de fer, ami et protecteur de la Junte militaire argentine, réactionnaire et aveuglé par le spectre du communisme.

Le pacte Reagan/Jean Paul II avait un seul objectif : fomenter une cabale pour renverser le communisme, à n’importe quel prix. Richard Allen, premier conseiller de Reagan à la Sécurité nationale, dira qu’il s’agissait de “l’une des alliances les plus secrètes de tous les temps”

La Sainte Alliance conduisit à un montage financier frauduleux organisé par le Vatican pour épauler clandestinement le syndicat polonais Solidarnosc, dont le leader de l’époque, Lech Walesa, deviendra président de la Pologne après la chute du Mur de Berlin.
 Ronald Reagan et Jean-Paul II étaient habités par la même obsession. Le juge William P. Clark, autre conseiller de Reagan à la sécurité nationale (et aussi le plus influent), dira également que tous deux “partageaient les mêmes choix spirituels et la même vision de l’empire soviétique : le bien et le droit triompheraient selon les plans divins” (The Judge : William P. Clark, Ronald Reagan’s Top Hand, de Paul Kengor et Patricia Clarck Doerne, Ignatius Press 2007).
Quant à l’utilité du Vatican dans cette croisade anticommuniste, le secrétaire d’État de Reagan, Alexandre Haig, l’a très bien résumée : “Le réseau d’information du Vatican était meilleur et plus rapide que le nôtre”. Pour l’Amérique latine, cette Sainte Alliance fut synonyme d’un véritable bain de sang, de guerres et de répression. Le Saint-Siège poursuivit de façon inhumaine tout ce que le continent comptait de progressiste en soutane. S’appuyant, pour ce faire, sur les secteurs les plus réactionnaires de l’Église et du pouvoir politique local et avec la participation de la Maison Blanche, c’est sans aucune hésitation, non plus, qu’il s’est acoquiné avec des congrégations et des personnages impliqués dans des agressions sur mineurs ou des vols en tout genre, comme ce fut le cas avec « Les légionnaires du Christ », de Marcial Maciel, que Jean-Paul II éleva à des hauteurs incroyables alors même que ses escroqueries et abus sexuels étaient de notoriété publique. De nombreux adeptes de la « Théologie de la Libération » payèrent de leur vie une telle persécution.
La complicité entre le Vatican et Washington est parfaitement documentée, et reflétée jusque dans les discours officiels de Ronald Reagan :
“L’Amérique latine est une zone pour laquelle nous éprouvons une préoccupation commune. Nous voulons y travailler en étroite collaboration pour promouvoir la paix, la justice sociale, les réformes et empêcher la propagation de la répression et des régimes tyranniques athées.” (Ronald Reagan, Jack Nelson, “Reagan, Pope Join in Urgent Plea for Peace”, Los Angeles Times, June 8, 1982).

Monter ce dispositif anticommuniste éleva Jean-Paul II au rang d’interlocuteur privilégié des membres de la CIA et d’autres personnages de la sécurité nationale américaine qui allaient à Rome grâce à Pio Laghi. À partir du milieu 1981, une sorte de “navette de renseignements” (intelligence shuttle) s’instaura entre Washington et le Saint-Siège.

L’un des visiteurs réguliers de cette époque est aussi de triste mémoire pour l’Amérique latine, le général Vernon Walters, ambassadeur itinérant de l’administration Reagan, ex-directeur adjoint de la CIA à l’époque du Coup d’État contre Salvador Allende. Dans son livre « The Mighty and the Meek » (St Ermin’s Press, 2001), le général Walters révèle les dessous de ses entretiens papaux. “L’administration avait conscience de la collusion d’intérêts entre l’Église Catholique et les États-Unis dans leurs efforts pour contenir l’expansion communiste. Je devais, en accord avec les ordres reçus, exposer les faits en m’appuyant sur les meilleures sources d’information disponibles. C’est ainsi qu’ont débuté les allers-retours réguliers au Vatican, deux ou trois fois par an. (…) Je faisais au Pape le compte-rendu des menaces engendrées par les missiles, les forces terrestres conventionnelles, l’aviation et la marine soviétiques”. Mais les sujets de discussion allaient bien au-delà. Aux dires des journalistes Carl Bernstein et Marco Politi  (« His Holiness : John Paul II and the Hidden History of Our Time », Doubleday, 1996), les entretiens avec le Souverain Pontife portaient aussi sur l’Amérique Centrale, région, à cette époque, durement touchée par la guerre au Salvador, au Guatemala et au Nicaragua sandinistes, où Washington apportait son aide militaire aux “contras”. Pio Laghi, lors de sa mission en tant que délégué Apostolique aux États-Unis (1980), assistait régulièrement aux réunions de sécurité et rencontrait fréquemment le directeur de la CIA, William Casey, qui était catholique. (…) En juin 1982, alors que Reagan et Jean-Paul II célébraient leur Sainte Alliance, dans les sphères pontificales proches du secrétaire d’État du Saint-Siège, Agostino Casaroli, et l’archevêque Achille Silvestrini, négociait avec le secrétaire d’État US Alexandre Haig et avec le juge William Clark. »

Ce rôle, joué par l’Église à travers l’État du Vatican et tout particulièrement sous la direction du pape Jean-Paul II, en fait une candidate de premier plan pour occuper le poste de la prostituée de l’Apocalypse. On a évidemment célébré en grande pompe l’écroulement de l’ex-Union soviétique (URSS) ainsi que la démolition du mur de Berlin. Ce qu’on a moins célébré c’est cette porte toute grande ouverte aux États-Unis et à l’Empire pour occuper toute la place de la gouvernance du monde. D’un monde bipolaire, l’humanité passa à un monde unipolaire. La Babylone contemporaine, en bonne compagnie de l’Église, se retrouva le maître absolu du monde. Quoi de mieux, pour les puissants de ce monde qu’un monde unipolaire où règne un seul maître qui peut en tout temps décider de ce qui est bien et de ce qui est mal, ce dont G.W. Bush ne s’est pas privé de faire.

LE PACTE DU 21 MARS 2014

Toujours selon Eduardo Febbro, ce second pacte, entre le papa François et  le président Obama n’aurait rien à voir avec l’esprit et les orientations prises dans le cadre du pacte entre le pape J.P.II et Reagan. Il s’agirait d’un pacte de toute autre nature et d’une approche totalement différente du premier pacte.


« Les personnages de cette saga diplomatique des temps modernes n’ont pas grand-chose à voir avec les membres du sinistre dispositif mis en place par Reagan et Jean-Paul II dans les années 80. Les diplomates expérimentés de Rome conjuguent dorénavant leurs efforts de négociations secrètes avec les envoyés spéciaux de Cuba et divers conseillers de la nouvelle génération venus tout droit de Washington. Le spectre du communisme ne poursuit plus personne. La jeunesse a été également un allié de poids. Voici l’exemple de l’un des hommes clés de ce cercle restreint, Ricardo Zúñiga, nommé par Obama en 2012 conseiller aux Affaires latino-américaines à la place de Dan Restrepo. Né au Honduras, en 1970, Zúñiga émigre aux États-Unis à l’âge de quatre ans. L’autre pilier central est Ben Rhodes, vice conseiller à la Sécurité nationale pour les communications stratégiques et l’écriture de Discours, lui aussi jeune (il est né en 1977). Leurs interlocuteurs ont été des hommes expérimentés et plus âgés, par exemple le secrétaire d’État du Vatican, Pietro Parolin, qui avait été nonce au Vénézuéla de 2009 à 2013. »

Il ne fait pas de doute que l’approche soit différente et que les acteurs soient également de profils différents. Toutefois, de là à dire que le « spectre du communisme ne poursuit plus personne » m’apparaît plutôt discutable. Pour illustrer mon point de vue, je prendrai quelques exemples récents venant de la haute hiérarchie catholique.

Mon premier exemple, je le puise chez un personnage qui occupe de très hautes fonctions dans la hiérarchie et au Vatican. Il s’agit du cardinal Oscar Andres Rodriguez Maradiaga du Honduras, membre du G-9, groupe spécial pour conseiller le pape sur les réformes de la Curie, et président de Caritas international.

Déjà, nous savons qu’il a joué un rôle important dans le coup d’État militaire au Honduras qui renversa le président démocratiquement élu, Manuel Zelaya. Le Cardinal n’était pas d’accord avec ce dernier qui s’était trop rapproché de Chavez, de son socialisme et de l’ALBA. Sur l’ensemble de cette question, je vous réfère à cet article que j’avais alors écrit sur cette grande alliance.

Il est bon de noter que les interventions du cardinal MARADIAGA apparaissent comme un signal de départ à quelque chose qui va se produire. Sa conférence de presse à Berlin a devancé d’un mois le lancement des activités de déstabilisation du gouvernement de Nicolas Maduro. En janvier de cette année, il a de nouveau discrédité, dans une conférence sur les réformes au Vatican, Hugo Chavez et son socialisme du XXIe siècle perçu comme un véritable fiasco. Religion Digital

« Le président de Caritas International a rappelé que le défunt président du Venezuela, Hugo Chavez, s’était présenté avec la promesse de lutter contre la corruption ce qui lui valut de nombreux votes. Toutefois, ce projet a fracassé. Ce socialisme du XXIe siècle n’était rien de plus que du capitalisme déguisé au service de quelques grands voleurs. Cela a fait bien des dommages » (R.D).

Au sujet de la participation populaire à la gouvernance de l’État, comme c’est le cas dans les pays émergents de l’Amérique latine, il a ces paroles :

« Les populismes dont ils s’alimentent ne sont que des feux de paille. »

Quelques semaines plus tard, c’était au tour de l’Épiscopat du Venezuela de prendre la parole pour dénoncer le communisme, le marxisme, le socialisme, l’autoritarisme. Une condamnation en règle du gouvernement qu’il accuse d’être le responsable de la rareté des biens essentiels dans les centres de distribution. Sur ce point précis, je vous réfère à un article demandant aux évêques de se rétracter, la rareté des biens étant causée par les principaux distributeurs du pays qui retenaient ces biens dans des entrepôts pour créer le mécontentement de la population contre le gouvernement en vue de la préparation d’un coup d’État.

Comme par pur hasard, les actions de déstabilisation du gouvernement et de préparation à un coup d’État suivirent les déclarations de ces hommes d’Église. Le 12 février 2015, le gouvernement du Venezuela démonta un coup d’État qui devait se réaliser ce jour même. Encore ici, je vous réfère à cet article portant sur ce démantèlement.

Fait à noter : à aucun moment de toute cette guerre économique et de ce coup d’État démonté, le Vatican et l’épiscopat vénézuélien ne sont intervenus pour dénoncer les responsables oligarchiques pour leurs actions criminelles. Pas une fois, ils se sont excusés pour avoir mal interprété les évènements. Pas une fois, ils ont élevé la voix pour rappeler le respect de l’ordre constitutionnel et dénoncer les actions de violence.

Et que dire de leur silence devant ces politiques agressives et interventionnistes de Washington dans les affaires internes du Venezuela. Ils ignorent le support que le Venezuela reçoit de la part des divers organismes d’intégration de l’Amérique latine comme UNASUR, CELAC, ALBA, et de l’ensemble des pays non-alignés.

Pourquoi le Vatican se tait-il devant ces actions unilatérales des États-Unis dans les affaires internes du Venezuela? Dans pareille circonstance, ne devrait-il pas rappeler à cet État interventionniste le respect du droit international des peuples et des nations à disposer d’eux-mêmes. Également, une occasion pour rappeler que seules les Nations Unies ont autorité pour procéder à pareilles interventions et cela dans le cadre du droit international. Sur toutes ces questions, le Vatican se tait.

D’ailleurs, ce silence du Vatican, chaque fois que Washington est impliqué, peu importe l’endroit dans le monde, est devenu une règle d’or. Nous ne l’avons pas entendu sur l’usage arbitraire des  sanctions contre la Russie, pas plus d’ailleurs sur le non-respect des frontières syriennes où les avions militaires étasuniennes  entrent et sortent sans se soucier du gouvernement syrien.

CONCLUSION

Je pense qu’il faut, au nom de la transparence, que le pape François rende public le contenu de ces accords secrets. Il en va de la crédibilité de l’Église et du pape François. La catholicité de l’Église l’oblige à prendre en compte la totalité de l’humanité. Ce serait bien mal vu s’il fallait qu’elle soit, par des pactes secrets, de mèche avec l’empire du mensonge, de la guerre, des conquêtes. Une enquête récente établit que 90% des victimes de la guerre sont des civils, que sur 248 conflits, les États-Unis en ont provoqué 201. Il est plus qu’urgent que la lumière soit faite sur ces pactes secrets et que la transparence promise par le pape François franchisse ces dernières résistances.



Je viens de mettre en ligne un article faisant l’éloge du pape François et défendant le positif de ses engagements et de ses paroles. Je crois ce pape sincère, mais peut-être aussi un peu naïf, comme il le reconnaissait lui-même dans son entrevue à la Revue jésuite. Il ne peut toutefois pas ignorer que son entourage a des atomes crochus avec Washington et que le lobby de ce dernier est très actif au sein de l’État du Vatican.

Si le deuxième pacte nous est présenté à travers les bons offices du pape François qui a rendu possible la reprise des relations entre Cuba et les États-Unis ainsi que l’échange de prisonniers, cela ne peut suffire pour nous convaincre qu’il n’y a pas anguille sous roche dans la partie secrète du pacte.

Je termine ce trop long article par une dernière observation évoquée dans ce second pacte. Il s’agit de la lutte contre le terrorisme. Le Vatican ne peut pas s’engager dans une lutte contre le terrorisme sur la base de ce que l’empire décide lui-même ce qui est terrorisme et ce qui ne l’est pas. Il est important que l’Église se fasse une idée sur ce qu’est le terrorisme et ceux qui en sont la principale source.

Pour le moment, tout indique que la prostituée de l’Apocalypse est quelque part dans cet État du Vatican qui a main mise sur l’Église tout en ayant le cœur sur l’Empire, cette Babylone contemporaine.

Oscar Fortin
Le 21 février 2015

jeudi 19 février 2015

UN PAPE HUMAIN POUR UNE HUMANITÉ SOUFFRANTE


 

Ce qui fait du pape François un des hommes les plus aimés et respectés de la terre, c’est sa passion toute simple pour l’Humanité dont chacun des membres doit y trouver la paix et le bonheur. Le pauvre, l’exclu, le malade, l’expatrié, le persécuté et toutes les personnes de bonne volonté sont au premier rang de ses préoccupations. Il a choisi de sortir de l’Église de pierre, de l’Église des institutions et des doctrines pour aller à la rencontre de cette Humanité en mal de vivre. Il y va avec toute l’humanité que lui inspire ce Jésus de Nazareth dont les Évangiles nous racontent l’histoire.

Le pape François ne se présente pas comme un être exceptionnel, comme quelqu’un de hors du commun. Il se présente plutôt comme un être qui porte en lui les mêmes contradictions auxquelles personne n’échappe. Il sait ce qu’est la souffrance physique et morale qui nous touche tous à des degrés divers. Sa situation actuelle n’est pas sans en faire la cible toute désignée des persécutions subtiles et haineuses de son entourage. De la nature humaine, il a appris ce qui pouvait la rendre si fragile et cruelle à la fois. Sa présence dérange, son enseignement en scandalise plusieurs et sa popularité engendre des sentiments de frustration et d’envie chez ceux qui rêvaient de cette fonction suprême. Il n’y a donc pas de surprise pour lui que ce mal, des ambitions et des envies, nous atteigne tous d’une manière ou d’une autre, créant ainsi des fossés énormes entre des êtres, pourtant faits pour s’aimer et s’entraider.  

Ce n’est pas pour rien qu’à sa première apparition comme pape à la balustrade de la Place St Pierre, il demanda au monde entier de le bénir pour que l’Esprit du Seigneur l’accompagne dans sa nouvelle mission, celle de faire revivre l’Église des Évangiles de manière à ce qu’apparaisse de nouveau le véritable visage humain de Jésus de Nazareth. C’est avec grande humilité qu’il assume cette responsabilité et ce sera en témoignant par sa propre vie qu’il procédera au dépoussiérage d’une Église en perte d’humanité.

Pape François avec des itinérants
S’il fait des appels répétés aux prêtres, évêques et cardinaux de sortir de leurs églises de pierre pour aller aux périphéries, là où sont les exclus, les pauvres, les laissés pour compte, il est le premier à sortir du Vatican pour aller à la rencontre de ce monde des périphéries. C’est vrai pour le diocèse de Rome dont il est le titulaire. On raconte qu’il lui arrive d’aller de nuit, vêtu d’une simple soutane noire, à la rencontre d’itinérants et de sans-abri. Il y va, accompagné de son secrétaire affecté aux bonnes œuvres. C’est également vrai pour ses voyages qui sortent du cadre protocolaire pour mettre en relief la spontanéité de l’homme et son accueil à tous ceux et celles qui s’en approchent. Il y a eu le Brésil, mais aussi la Corée du Sud, les Philippines où les foules lui ont témoigné un attachement exceptionnel.

Partout où il passe, il voit en ces hommes, en ces femmes en ces jeunes, ce Jésus de Nazareth qui a dit et répété à plusieurs reprises ce que vous faites aux plus petits des miens, le pain que vous donnez à celui qui a faim, les soins que vous apportez aux malades, les visites que vous réalisez auprès de ceux qui sont seuls, tout cela c’est à moi que vous le faites. Ce Jésus qu’il porte en lui est également ce même Jésus qui prend sur lui la situation humaine de tous ces gens qu’il se garde bien de juger pour mieux les aimer.

En ce jour du mercredi des Cendres, jour qui nous rappelle que tout le matériel dont nous nous enveloppons n’est que poussière, il a eu de nouveau ces paroles qui reviennent comme un thème majeur de sa pensée « Dieu ne se fatigue pas de nous faire miséricorde ». C’est sans doute une manière de sortir l’humanité de la déprime en lui rappelant que le regard que porte Père sur elle est toujours un regard d’amour, peu importe les itinéraires par lesquels le destin nous a conduits. Il suffit d’ouvrir son cœur, de relever la tête et d’aller droit en avant avec ce même amour et cette même miséricorde.

Le pape François n’est pas obsédé, au grand déplaisir de plusieurs, par une Église à sauver, par une doctrine à proclamer sur toutes les tribunes où il passe. Il est plutôt obsédé par une Humanité à retrouver, par un Évangile à proclamer. Il se fait proche des blessés de la vie et critique de ceux et celles qui imposent un système de gouvernance qui transforme les deux tiers de l’humanité en marchandise à mettre aux déchets. Il s’agit d’un monde d’exclusion, tout à l’opposé du monde de l’inclusion où chaque personne est reconnue et respectée. Dans son Exhortation apostolique, Evangelii Gaudium, il dénonce cette situation.

« 53. De même que le commandement de “ne pas tuer” pose une limite claire pour assurer la valeur de la vie humaine, aujourd’hui, nous devons dire “non à une économie de l’exclusion et de la disparité sociale”. Une telle économie tue. Il n’est pas possible que le fait qu’une personne âgée réduite à vivre dans la rue, meure de froid ne soit pas une nouvelle, tandis que la baisse de deux points en bourse en soit une. Voilà l’exclusion. On ne peut plus tolérer le fait que la nourriture se jette, quand il y a des personnes qui souffrent de la faim. C’est la disparité sociale. Aujourd’hui, tout entre dans le jeu de la compétitivité et de la loi du plus fort, où le puissant mange le plus faible. Comme conséquence de cette situation, de grandes masses de population se voient exclues et marginalisées : sans travail, sans perspectives, sans voies de sortie. On considère l’être humain en lui-même comme un bien de consommation, qu’on peut utiliser et ensuite jeter. Nous avons mis en route la culture du “déchet” qui est même promue. Il ne s’agit plus simplement du phénomène de l’exploitation et de l’oppression, mais de quelque chose de nouveau : avec l’exclusion reste touchée, dans sa racine même, l’appartenance à la société dans laquelle on vit, du moment qu’en elle on ne se situe plus dans les bas-fonds, dans la périphérie, ou sans pouvoir, mais on est dehors. Les exclus ne sont pas des ‘exploités’, mais des déchets, ‘des restes’. »

Les Évangiles sont un phare qui ne laisse personne dans l’ombre. Ils sont un rappel constant que nous appartenons tous et toutes à la grande famille humaine et que nous sommes tous et toutes des frères et des sœurs, unis dans un même destin qui nous conduit à cette terre nouvelle dont nous parle le livre de l’Apocalypse.

« Et j`entendis du trône une forte voix qui disait: voici le maison de Dieu avec les hommes! Il habitera avec eux, et ils seront son peuple, et Dieu lui-même sera avec eux. l essuiera toute larme de leurs yeux, et la mort ne sera plus, et il n`y aura plus ni deuil, ni cri, ni douleur, car les premières choses ont disparu. » Apc.21,4-5

C’est à cette tâche de l’avènement d’une humanité nouvelle que nous sommes tous et toutes conviées. Le pape François souffre de voir autant de guerres, d’atrocités, d’armements toujours plus sophistiqués pour tuer ses semblables. Son témoignage de vie et sa parole sont des rappels que tout n’est pas perdu, qu’il y a un horizon lumineux qui  nous invite à retrousser nos manches de la justice, de la vérité, de la solidarité, de la compassion, de la miséricorde, de l’inclusion sociale et humaine pour avancer à la rencontre de cette terre nouvelle. C’est là que l’Église retrouvera sa fraîcheur et que les humains reconnaîtront l’authentique visage de Dieu.

Longue vie au pape François

Oscar Fortin
Québec, le 18 février 2015