lundi 2 mai 2016

LA PATIENCE CONTRÔLÉE DE POUTINE




Les plus âgés se souviendront de la crise d’octobre 1962 qui porta l’humanité à un cheveu d’une guerre nucléaire.  L’enjeu était la présence sur l’île de Cuba d’un missile à tête nucléaire que la Russie avait offert à Cuba, suite à l’attaque étasunienne a la baie des Cochons,  en 1961, comme force dissuasive à toute autre intervention des États-Unis contre Cuba. C’était alors inacceptable pour les États-Unis que l’ex-URSS affirme sa présence nucléaire à 90 milles des côtes de la Floride. Il fallait à tout prix qu’elle mette fin à ce projet et qu’elle démantèle les bases de lancement de ces armes nucléaires sinon la première guerre nucléaire serait déclenchée.

Depuis lors, l’ex-URSS a été démantelée, de nombreux pays qui lui étaient rattachés ont été charmés par l’Occident et en sont devenus des alliés militaires. Leurs frontières furent grandes ouvertes pour recevoir des bases militaires avec les armes les plus sophistiquées pour, soi-disant, les protéger contre une invasion de la Russie. C’est avec empressement que les Etats-Unis et ses alliés de l’OTAN s’empressèrent à occuper ces espaces nouveaux. Ce qui était inacceptable pour Cuba, en 1962, l’est devenu pour la grande majorité des pays de l’ex-URSS.

Il est évident que Poutine voit clairement le jeu des États-Unis et de l’OTAN qui encerclent ainsi militairement la Russie. Ces mêmes pays qui se prêtent à la  militarisation de leur territoire deviennent, sans trop s’en rendre compte, le bouclier humain de toute attaque possible de la Russie contre les forces de l’OTAN. Ces armes dont disposent ces pays seront les premières cibles de toute intervention russe. Les populations en seront les premières vicitmes.

Aujourd’hui, du 2 au 19 mai 2016, sont initiés, en Estonie, tout près des frontières russes, des exercices militaires d’envergure de l’OTAN. Ces exercices sont souvent l’occasion d’introduire des armes de haute technologie dans ces pays frontaliers avec la Russie. Poutine voit et sait ce que les États-Unis et l’OTAN ont à l’esprit avec ces manœuvres militaires. Il sait que les provocations sont là pour l’amener à poser un geste militaire offensif afin de les justifier à attaquer la Russie en défense des pays frontaliers.

Ce sont ces mêmes personnages qui font un jeu semblable en Syrie en s’attribuant le rôle des défenseurs des veuves, des orphelins et des persécutés en déployant tous les efforts pour combattre les soi-disant le terroristes et soutenir, à travers ces mêmes terroristes, l’opposition armée qui lutte contre le régime de Bachar Al Assad. Il ne fait pas de doute que Poutine voit ce double jeu et qu’il décode les stratégies de ceux qu’il continue d’appeler ses partenaires. Sa patience résiste à ces manœuvres, mais il a, à certains moments, des interventions à ne pas prendre à la légère.  Il y a des lignes rouges à ne pas dépasser.  La sécurité du peuple russe ne doit être, en aucun cas menacée. Pour la Syrie, la ligne rouge à ne pas dépasser est celle du non-respect du droit international et la déstabilisation du gouvernement légitime de Bachar al Assad. L’envoi tout récent de 250 militaires étasuniens en territoire syrien, sans l’accord du gouvernement syrien constitue une invasion et est inacceptable en droit international. À ce sujet,  Moscou a fait savoir qu’elle appuierait toute intervention légitime du gouvernement dans sa lutte contre le terrorisme et ceux qui le soutiennent de diverses manières.

L’art martial du karaté a sans doute appris à Poutine que les coups qui portent le plus sont ceux qui sont placés au moment le plus opportun. Lorsque les coups de l’attaquant n’arrivent pas à atteindre les points forts de l’adversaire, il se retrouve en situation de faiblesse et de vulnérabilité. Dans tout combat, il n’y a pas que les muscles qui comptent, mais aussi, et sans doute davantage, l’intelligence. C’est sans doute ce qui peut expliquer la patience de Poutine, un des hommes les plus informés de la planète. Il mesure les forces dont il dispose, connaît celles de ses adversaires,  et attend le moment venu pour frapper là où il n’y aura pas de retour.

Il ne faut pas oublier ce que les rues de St-Petersburg lui ont appris : « lorsqu’on réalise que la bagarre est inévitable, il faut frapper le premier. » Il faut croire qu’il continue d’espérer qu’une entente puisse être possible. Pour le moment, ses partenaires occidentaux continuent leur double jeu. Poutine le sait, mais il sait  également que ce double jeu finira par avoir raison d’eux.  Poutine est de moins en moins seul et ses adversaires de moins en moins crédibles.

Oscar Fortin


Le 2 mai 2016 




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